ANALYSES D'OUVRAGES 189
Judith P. Swazey, Chlorpromazine in Psychiatry. A study of Therapeutic, Cambridge, Massachusetts (Etats-Unis) et Londres (G.-B.), 16x23 cm, 340 p. Prix : £ 8,75.
La chlorpromazine (commercialisée en 1952 en France sous le nom de largac- tyl) est le prototype des phénothiazines neuroleptiques dont on distingue trois familles :
a) les composés les plus sédatifs à chaîne linéaire ;
b) les composés pipérazines à manifestations hyperkynétiques ;
c) les composés pipéridinés à faible incidence d'effets neurologiques.
La phénothiazine fut synthétisée par August Bernthsen (1855-1911), en 1883, à Heidelberg. Treize ans plus tard (1896), Emil Kraepelin définissait, dans la même ville, le syndrome schizophrénique. Mais il fallut attendre soixante-dix ans pour que l'on s'aperçoive que le remède avait été trouvé avant la maladie.
C'est, en effet, seulement après la découverte par Sir Henry Halett Dale (1875-1968) et son équipe (1910) du rôle de l'histamine dans le choc anaphylactique que l'intérêt se porta sur les antihistaminiques de synthèse. La maison Rhône-Poulenc (Specia), par l'intermédiaire du laboratoire d'E. Fourneau, joua dans ces recherches un rôle primordial, bien mis en lumière par l'auteur. Il faut d'ailleurs ajouter que, très vite, des travaux américains importants furent entrepris dans le même sens par D. I. Macht (1940), Gilman et Shirley (1944) et Ch. Winter et Flakater (1947) (1949) (1951) des laboratoires Merck, et qu'il y eut échanges de vues entre les chercheurs qui travaillaient des deux côtés de l'Atlantique.
A partir des synthèses de E. Fourneau sur certaines amines un certain corps fut obtenu : la thymoxyéthyldiethylamine 929 (Daniel Bovet et Mlle Stuart, 1937), préparation inactive. La phenbenzamine se montra active et peu toxique (Mosmier et Halpern, 1942).
En 1944, Paul Charpentier synthétisa une nouvelle série de dérivés de la phénotiazine dans laquelle Halpern et Ducrot décelèrent (1945) un antihistami- nique puissant : le 3015 R.P. (fenethazine). Sur ces bases, Charpentier continua ses recherches et obtint le 3277 R.P. (prométhazine ou phénergan). Puis vinrent le multergan, antihistaminique et anticholinergique (1950), et enfin la chlorpromazine (4560 R.P.). Le travail chimique de Charpentier fut suivi d'une longue étude physiologique confiée à Mme Courvoisier, J. Fournel, R. Ducrot, Mlle M. Kolsky et Pierre Koetschet (1950-1951). Elle se montra favorable et la chlorpromazine fut d'abord utilisée en chirurgie par H. Laborit. Il s'en servit pour réaliser l'hibernation artificielle à l'aide d'un cocktail lytique à base de phénergan, de dolosal et de largactyl (1951). Peu après, J. Delay et P. Deniker virent dans le largactyl, drogue psychotrope, le prototype du médicament psychiatrique. C'était le grand départ de la chimiothérapie des maladies mentales (1952). De là , le médicament gagna l'Angleterre, l'Italie, l'Autriche, la Suisse, le Canada et les Etats-Unis, ce qui donna lieu à des négociations entre les laboratoires Specia et les laboratoires américains, à la suite desquels le 4560 devient la thora- zine. L'auteur qui s'est renseigné aux meilleures sources nous donne de très nombreux détails sur le voyage triomphal du 4560 R.P. autour du monde. En ce qui