Longtemps considéré comme le grand espoir des lourds, l’Américain Deontay Wilder affronte Bermane Stiverne pour le titre WBC, ce samedi à Las Vegas. Avec en ligne de mire une réunification historique face à Wladimir Klitschko.
C’est un folklore dont il se passerait bien. A chacun de ses combats, Wladimir Klitscko, champion du monde des lourds, est harcelé par un illuminé qui lui réclame sa chance, torse nu face aux caméras, à grand renfort de « LET’S GO CHAMP, LET’S GO CHAMP ». L’hurluberlu gonflé aux protéines s’appelle Shannon Briggs ; avant d’être une starlette du web, il était un poids lourds respectable. En 2008, il a même brièvement détenu une version du titre (WBO)… avant d’être expédié sur un lit d’hôpital par l’aîné Klitschko à sa deuxième chance mondiale. Le rapport avec notre affaire ? Depuis ce brave Shannon, plus aucun américain n’a disputé un championnat du monde chez les lourds…
2008, toujours. A l’autre bout du monde, un certain Deontay Wilder accroche un podium olympique. Médaille de bronze à Pékin, le natif de l’Alabama passe pro dans la foulée. Sept ans plus tard, le palmarès affiche des stats à la George Foreman : 32 succès, 32 KO, le tout sans jamais dépasser un quatrième round. « Avec lui, l’Amérique tient la relève de la division poids lourds », disait Richard Schaefer, son ex-promoteur, l’année dernière.
Aux États-Unis, dire que cette relève est faible est un pudique euphémisme. Depuis Wilder, pas un Américain n’a été médaillé aux Jeux. Loin du temps des Ali, Holmes et autres Spinks, les « gros » sont aujourd’hui partis garnir les rangs grassement payés de la NBA ou de la NFL. Autrefois reine, la catégorie des lourds, snobée par les diffuseurs US, ne joue plus son rôle de moteur. W. Klitschko lui-même n’a plus boxé aux États-Unis depuis 2008, pour un douze rounds qui ferait passer les championnats du monde de fléchettes pour de l’entertainment…
Alors Wilder peut-il à lui seul réveiller la catégorie ? Difficile à dire. La valeur d’un palmarès tient aux adversaires qui sont dessus. Et à ce petit jeu-là, il faut bien le dire : Wilder n’a affronté PERSONNE. Malik Scott, son seul détracteur crédible, s’est couché la première droite venue. Pour le reste : une kyrielle de seconds couteaux, de « club fighters » et d’anciens bons boxeurs…
En termes d’expérience, malgré sa breloque et ses 29 ans, Wilder reste un quasi-novice. Chose rare à ce niveau, l’Américain n’a débuté la boxe qu’à 19 ans. Sa période amateur, essentielle dans la formation d’un boxeur, fut brève : une vingtaine de combats seulement avant les JO. Chez les professionnels, il n’a que trop peu été touché, encore moins ébranlé ni poussé dans ses limites physiques. La taille (2m), le punch, la vitesse d’exécution, nul ne conteste ses qualités à Deontay Wilder. La résistance, l’intelligence tactique, en revanche…
Wilder a pourtant bénéficié des leçons du maître en la matière : Wladimir Klitschko, dont il a été l’un des sparring-partners en 2012. Quelques mois plus tard, l’Américain croisait les gants avec David Haye. Des vidéos de ces échanges ont circulé sur le web : on y voit un Wilder brouillon, contré à plusieurs reprises et au bord du KO…
Face à lui, Bermane Stiverne n’est pas un monstre d’expérience mais ses deux succès face à Cristobal Arreola offrent un peu plus de certitudes. Le dernier en date, par KO, lui a offert le titre WBC laissé vacant par Vitali Klitscko qu’il défend pour la première fois. « Deontay Wilder est une escroquerie, et je vais vous le démontrer » a-t-il déclaré.
Il y a bien longtemps qu’un duel de poids lourds n’avait pas suscité un tel intérêt, aux USA comme ailleurs. Avant son combat contre Kubrat Pulev, la chaîne américaine HBO avait acquis les droits des trois prochains combats de Wladimir Klitschko, misant ainsi sur une future réunification historique avec Wilder. Peut être le duel le plus alléchant chez les lourds depuis Lennox Lewis et Vitali Klitschko en 2003. Il y a douze ans, déjà….
Jean-Charles Barès (@jcbares)
Diffusion : BeIN Sports 3, en direct à partir de 3h55
Pour aller plus loin, l’épisode All Access de 17′ produit par Showtime :